Montreuil, îlot Éluard : Que vont devenir nos immeubles ?

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Dans toutes les villes proches de Paris, des projets de transformation urbaine sont mis en place régulièrement. L’un d’eux, le PNRQAD (Programme National de Requalification des Quartiers Anciens Dégradés), a été voté par les villes de Montreuil et de Bagnolet pour les quartiers des Coutures et du Bas-Montreuil. Pour valider le projet, les mairies sont obligées d’organiser des « réunions de concertation » avec des habitants. Ces réunions consistent à leur soumettre le projet et non à le discuter. Les habitants ne sont invités que pour poser des questions auxquelles la mairie s’attache à répondre de la manière la plus vague possible. Il a même été répondu à une question : « vous n’avez qu’à aller vivre à la campagne » …

Le mercredi 10 octobre 2012, une de ces réunions s’est tenue dans le réfectoire de l’école primaire Voltaire à Montreuil. Elle concernait l’îlot Paul Eluard, compris entre les rues de Paris, Valette, Paul Éluard et Robespierre. Étaient présents le chef de projet de l’habitat ancien (du PNRQAD à Montreuil), Mathieu Leprêtre ; l’adjoint au maire à l’urbanisme, Daniel Mosmant ; et une représentante de la SOREQA (Société de Requalification des Quartiers Anciens).

Ils ont présenté le projet qui, selon eux, va permettre de « lutter contre l’insalubrité, la pénurie de logements et le manque d’attractivité commerciale ». D’ores et déjà, les différents immeubles de l’îlot ont été classés suivant un « degré d’insalubrité » allant de 1 à 6, cette classification devant servir à déterminer l’avenir de ces immeubles.

Concernant les locataires, la mairie a prétendu que les occupants actuels de ces immeubles pourraient revenir dans leur logement rénové avec la garantie du plafonnement des loyers pendant 5 ans (lors de cette période, le loyer ne pourra pas augmenter outre mesure).

Quant aux bâtiments détruits, elle dit s’engager à reloger les habitants dans le quartier. Mais à quel prix ? La mairie ne précise pas le montant des nouveaux loyers.

De plus, tous les habitants ne seront sans doute pas concernés par les propositions de relogement : qu’en sera- t-il des squatteurs ?

Des personnes en retard de paiement de loyers ?

Des sans-papiers ?

Des personnes ne figurant pas sur le bail (ou n’y habitant pas officiellement) ?

Quant aux occupants actuels qui sont propriétaires, certains pourraient être poussés à partir.

En effet, la mairie peut les forcer à réaliser des travaux qu’ils ne pourront pas payer ; elle peut les exproprier ou préempter leur bien.

Les organisateurs ont aussi prévu d’inclure dans leur projet la transfor mation des commerces qu’ils jugent « déqualifiés » c’est-à-dire, selon eux, de « mauvaise hygiène » et de « mauvaises marchandises ». Autrement dit, des commerces actuels laisseront la place à des commerces moins bon marché.

Nous connaissons la réalité de l’état des logements dans lesquels nous vivons. Pour certains, des rénovations doivent être faites. Mais pour d’autres, ce n’est sûrement pas leur état qui a déterminé leur avenir – d’ailleurs, les organisateurs de la réunion du 10 octobre ont avoué eux-mêmes que personne n’était rentré à l’intérieur des logements !

Quand les pouvoirs publics veulent s’attaquer à un immeuble, il arrive qu’ils le classent « insalubre », afin de déguiser le fait qu’ils chassent des gens en une opération soi-disant humaniste. Dans l’îlot Paul Éluard, le projet concerne à l’heure actuelle 9 immeubles appartenant à 5 propriétaires qui possèdent 138 logements. Depuis des années, ces propriétaires, tout comme la mairie, laissent parfois pourrir ces logements, qualifiés aujourd’hui d’insalubres.

Ce programme, le PNRQAD, va accélérer la hausse du coût de la vie et des loyers, contraignant une grande partie d’entre nous à quitter le quartier. Les habitants à qui la mairie promet le relogement, ne le seront pas forcément dans le même quartier, ni au même prix. Les immeubles reconstruits ne seront sûrement pas habités par les mêmes personnes car les loyers risquent d’augmenter énormément, soit à la suite des travaux, soit 5 ans après.

Les futurs locataires, qui auront plus de moyens pour habiter ces nouveaux logements, en auront plus pour consommer.

La ville « propre » que souhaite la mairie est en fait une ville habitée par des gens qui ont de l’argent.

Le projet commencera à se concrétiser en janvier prochain lorsque chaque logement de l’îlot Voltaire sera visité par les enquêteurs de la SOREQA. Les collectivités locales comme Est-Ensemble ou la mairie de Montreuil sont actionnaires de cette société publique d’aménagement. Cette dernière est missionnée par la mairie de Montreuil pour réaliser une étude sociale sur les occupants des logements concernés par la rénovation ou la destruction. Les questions porteront probablement sur le nombre de personnes occupant le logement, leur « composition sociale », leurs ressources… Le but est d’établir un « plan de relogement », qui sera sans doute différent en fonction des situations et ne s’appliquera pas à tout le monde. On ne sait pas si les habitants sont obligés, ou pas, d’accepter cette visite ; ni ce qu’implique le fait de répondre aux questions posées ou de n’y pas répondre. Quoi qu’il en soit, on peut entrevoir à travers ces enquêtes, un risque fort de division entre les habi tants. À chacun son relogement ou son expulsion. Les pouvoirs publics ont tendance à considérer chacun comme un cas particulier tout en niant ses attaches aux quartiers, à son logement et à son histoire. Ils veulent encore transformer la ville à notre insu et à nos dépens.

Nous ne voulons pas que notre quartier ressemble à ceux de l’Est parisien. Là- bas aussi, sous couvert de lutte contre l’insalubrité, des milliers de personnes ont été forcés à partir. Nous sommes convaincus que nous pouvons nous opposer ensemble à ce qui se cache derrière ce programme, notamment le fait que les habitants actuels devront quitter le quartier. Nous voulons que chacun ait la possibilité d’habiter là où il le souhaite et comme il l’entend.

Le collectif « Prenons la ville » propose des moments de rencontres, d’échanges, et d’organisation les 1er et 3e lundis de chaque mois.

L’après-midi, de 16h30 à 19h30, c’est l’occasion de partager des informations sur le devenir des logements et du quartier. De trouver des réponses collectives.

Le soir, à partir de 19h30 une réunion permettra de faire ensemble le point sur l’avancée du projet et des problèmes qu’il entraine ; de lutter contre la hausse du coût de la vie, des loyers, contre le départ forcé des quartiers où nous habitons…

Au Rémouleur, 106 rue Victor Hugo, 93170 BAGNOLET (Métro Robespierre ou Gallieni)

degage-onamenage@riseup.net

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